Whatsapp pour la com’ publique : l’anti réseau social ?

WhatsApp est l’application de messagerie la plus populaire du monde avec ses 2 milliards d’utilisateurs dans 150 pays différents. Les chaînes (ou actus) sont apparues à l’été 2023 et ont rapidement été utilisées par de nombreux médias ou stars internationales pour communiquer auprès de leur communauté de manière privilégiée. Même si cette fonctionnalité de canal de diffusion peut être séduisante, les limites liées aux interactions et à ce côté très vertical questionnent. Alors qu’en pensent les rares communicants publics à l’avoir essayé ? 

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Pourquoi se lancer ?

Dans son fonctionnement, le canal de diffusion WhatsApp ressemble aux alertes push ou à une notification : un message descendant qui s’affiche sur le smartphone d’un usager, avec une interaction limitée. Quand l’alerte SMS peut être très lourde à gérer (un contrat coûteux ou un marché à passer, utilisation liée à des situations de crise et donc procédure définie en interne), le canal de diffusion peut s’avérer plus simple, avec une plus forte éditorialisation qu’une simple alerte. C’est parce qu’il y a une construction d’un angle et du contenu enrichi que cet outil entre dans le giron des outils numériques, et à fortiori de ceux gérés par les community managers. Plus qu’un simple push, donc ! 

Du côté de Grenoble, deux raisons ont motivé le lancement d’un canal : la volonté de toucher des publics à la fois éloignés des réseaux sociaux et utilisateurs de l’application de messagerie, mais surtout une idée qui a émergé d’une Convention citoyenne locale pour le climat : “Les participants ont invité la collectivité à mieux communiquer sur ses actions et l’ensemble des médias ont été réinterrogés, surtout pour atteindre ceux qui ne sont pas sur les réseaux mais qui ont WhatsApp”, explique Sigrid Zinant, Community Manager à Grenoble-Alpes Métropole. La fréquence établie est de trois envois par semaine en fonction des actualités impactant la vie quotidienne des habitants : infos pratiques, ouverture/fermeture de services, alertes météo et événements exceptionnels. “On décide ensemble le mardi en équipe de rédaction de ce que l’on va traiter, on s’assure d’avoir un lien vers le site ou vers le magazine quand on sort l’information sur WhatsApp. Au niveau validation, comme le sujet en lui-même est validé, on nous fait confiance sur la diffusion en fin de semaine”, précise Sigrid. 

 À Blagnac, près de Toulouse, là aussi l’intention est de toucher ceux qui sont plutôt éloignés des réseaux sociaux utilisés traditionnellement. “Le maire a adoré l’idée, il utilise lui-même WhatsApp dans son usage personnel. Le principe est d’y diffuser une information utile et pratique, qui donne envie qu’on la partage à ses voisins, sa famille, ses collègues… incitant donc à faire circuler l’info dans d’autres conversations ! Et la plus-value est liée à l’impératif de ne pas être dans un ton institutionnel, mais bien de respecter les codes d’une messagerie : il faut aller à l’essentiel”, précise Alexandra Grenon, responsable du pôle Actualités à la Ville de Blagnac

Quelques exemples d’utilisation de WhatsApp

La plupart des collectivités qui choisissent de s’engager sur WhatsApp ont, contrairement à la mairie du 20e arrondissement de Paris, une promesse de contenu relativement homogène : des annonces d’événements et des actualités pratiques pour le quotidien. 

Même le gouvernement s’y met

Le gouvernement vient de lancer début avril sa chaîne WhatsApp pour “informer sur l’actualité gouvernementale et interministérielle” et, concrètement, publier un récapitulatif des mesures prises sur différents sujets comme le prêt à taux zéro, le harcèlement scolaire ou l’éducation, à la manière de leur format “Ce qui change au 1er janvier…”. Une décision qui contraste avec celle prise en mai 2023 par l’Union européenne d’infliger une amende record de plus d’un milliard d’euros au groupe Meta pour son transfert de données de l’UE vers les Etats-Unis. Mais après tout, cela relance le débat des institutions présentes sur les réseaux dont elles dénoncent plus ou moins les méthodes, comme TikTok ou les réseaux du groupe Meta. Vous avez dit nécessité ?

Côté RGPD, ça dit quoi ?

En apparence, le cadre RGPD proposé par WhatsApp peut sembler plus vertueux qu’une collecte de mailing avec nom, prénom et adresse e-mail. Ici, “pas de collecte, pas de visibilité des numéros de téléphone que l’on contacte”, comme le souligne Damien Pfister, directeur de la Communication à Villeparisis. Du côté de Meta, une promesse de “confidentialité renforcée” avec les indications que l’on peut trouver en cliquant sur la rubrique “En savoir plus” : 

Quels retours d’expérience ?

“Même s’il est encore un peu tôt, le démarrage est prometteur !”, estime-t-on à Grenoble qui établit un retour d’expérience positif, avec plus de 600 abonnés depuis fin décembre et des interactions croissantes : entre 50 et 100 réponses à chaque message. Il faut dire qu’ils ont joué le jeu de l’interactivité dès le début, avec un sondage réalisé quelques semaines après le lancement auprès de la communauté naissante, pour “coconstruire avec eux la stratégie de contenu à déployer”. L’équipe communication ajuste sa ligne éditoriale en fonction des retours à cette enquête.

Si vous envisagez vous aussi de sauter le pas, deux choses semblent importantes à savoir. D’une part, il est important de faire la promotion de la chaîne car elle n’est pas référencée dans les moteurs de recherche. D’autre part (et c’est une bonne nouvelle) : même si un seul numéro de téléphone est associé à une chaîne (et donc un compte !), “plusieurs administrateurs peuvent être nommés pour la gérer”, nous rassure Sigrid Zinant de Grenoble.

Notre avis : à suivre avec attention !

Les chaînes WhatsApp rencontrent davantage de succès que leurs homologues de Télégram ou d’Instagram, en raison de la popularité de l’application et son déploiement dans le monde. Ce qui explique une plus grande adhésion aux informations transmises via ce réseau social des usagers des collectivités qui s’y sont essayées en France. Des groupes d’un côté, des chaînes de l’autre, mais généralement, les collègues qui ont franchi le pas adoptent un planning éditorial léger avec peu d’actualités par semaine et une promesse éditoriale qui s’oriente vers de l’information pratique. La très faible possibilité d’interaction (likes ou sondages) ne classe pas WhatsApp dans la famille des réseaux traditionnels, mais il y a un créneau éditorial qui se démarque, quand tous les autres réseaux ont, de nos jours, tendance à se ressembler. Une tendance à suivre sur la durée !

Pour aller plus loin :


Mickaël Delaune


Mickaël Delaune est Community Manager à la Ville de Poitiers et à l’agglomération de Grand Poitiers. Ancien responsable communication d’une commune, il est membre de l’Observatoire.

NB : cet article est en accès libre pendant une semaine puis réservé aux membres de l’Observatoire (inscription gratuite ici).

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